Marabouts, sorciers, féticheurs, charlatans… autant de substantifs expressément créés pour semer la confusion et le brouhaha dans la conception africaine du prêtre. Avant l’avènement du christianisme en effet, l’organisation de l’Afrique rayonnait tant sur le plan socio politique que culturel. Parmi les composantes de la société se trouvait une classe bien particulière: celle des prêtres et prêtresses, envoyés des dieux sur terre et courroie de transition entre le monde visible et celui de l’invisible, entre le monde des esprits et celui des hommes.
Ces derniers qui jadis garantissaient l’harmonie et le bien-être des populations, se sont vus et se voient encore persécutés et honnies par les adeptes des religions abrahamiques qui n’ont eu de cesse de les traiter de tous les noms d’oiseaux de mauvais augure. De nos jours, nul n’est réellement capable de décrire de façon unanime la fonction de marabouts, de sorcier, ou encore de féticheurs. En sus qui serait à même de donner aux prêtres africains un nom qui ne crée pas de polémique? Pour les uns ce sont des guérisseurs, pour d’autre ce sont des sorciers, les adeptes du Diable ou des forces du mal.
Le problème d’office naît du fait que nous utilisons des langues exogènes pour expliquer les réalités endogènes, ce qui biaise le débat à l’avance. L’idéal serait, pour lever toute équivoque, propice de nommer en nos langues et en Afrique, on les appelle communément les Nganga. En pays Kamita lors qu’on dit Nganga (Kamsi ou Magnisi chez les Bamiléké du Cameroun) le fait qu’il s’agisse d’un envoyé des dieux ne souffre d’aucun doute.
Soulignons qu’en Afrique, le rôle des Nganga est principalement salvateur pour la population. Il en existe d’ailleurs deux types :
– Les voyants: Ils sont capables de prédire l’avenir, de diagnostiquer l’origine de votre mal, donner des directives pour un résultat attendu,
– Les guérisseurs: Ceux-ci sont très efficaces dans le lavage, le blindage, la naturopathie.
Ceci dit qu’il y’a des Nganga spécialistes dans la vision et prédiction (voyant) et ceux spécialistes dans le traitement (guérisseurs). Il y en a aussi specialistes en les deux; tout dépend du don reçu et du degré d’initiation. Soit les voyants que les guérisseurs n’utilisent pas forcement la même méthode. A titre d’exemple, il y’a des voyants qui utilisent les cauris pour lire l’avenir, ceux qui utilisent la mygale, ceux qui un œuf de poule (du village)… On devient Nganga par cooptation et initiation par les esprits qui nous choisis.
Comment reconnaitre un bon Nganga ?
1- Ils ne font pas de publicité, ce sont leurs ex patient qui en font pour eux;
2- Ils ne vivent pas de leur travail de Nganga, ils ont un travaille parallèle: plantations, activités commerciales ou professionnelles. A cet effet, leur richesse matérielle (s’ils en ont), ne provient jamais de leur activité de Nganga;
3- Ils ne demandent pas de sommes exorbitantes pour le travaille qu’ils abattent;
4- Afin de préserver la paix et la cohésion sociale, ils ne vous disent jamais qui est/était l’auteur de votre mal mais vous conseillera plutôt de vous éloigner d’un tel ou de vous en méfier;
5- Ils ne vous réclament pas des sacrifices humains;
6- Ils ne vous promettent pas de l’argent mais du travail, ils ne vous conseillent pas la vengeance mais le pardon, ils ne prêchent pas la haine, mais l’amour…
Si vous en connaissez qui pratique le contraire ne serait-ce d’un seul des éléments su-cités, éloignez-vous en à pas de géant. Soulignons tout de même que le dualisme jour/nuit, Bien/Mal, Homme/Femme, Rire/Pleur…font partie de l’animation cosmique. Ceci dit, s’il existe le bien, il existe aussi le mal. En effet, les Nganga ne sont malheureusement les seuls capables d’entrer en contact avec le monde des esprits et d’interagir avec ces énergies. Toutefois, c’est l’orientation qu’ils prennent qui diffèrent tandis que leur opposés manipulent des énergies négatives pour envouter, jeter des sorts, les Nganga sont présents pour les contrecarrer grâce aux énergies positives qu’ils incarnent, en guérissant et en désenvoûtant.Rappelons que le corps humain est comme une maison devant laquelle rode un lion affamé. Si nous ouvrons la porte, il entre dans la maison et dévore tout sur son passage. Mais puisqu’on ne peut vivre cloitré chez soi, il faut avant d’ouvrir la porte, soit être prêt à affronter le lion, ou avoir fait au préalable le “nécessaire” pour “l’éloigner” de la maison et l’un ou l’autre appartient au domaine de la connaissance qui, généralement, reposent entre les mains des initiés au rangs desquels se trouvent les Nganga.
Pour mieux contrôler les Africains, les religions importées ont commencé par les éloigner de leur protecteurs et guérisseur, arguant que ces derniers étaient des adeptes du Diable, ennemi numéro 1 de leur Dieu, et que seul Jésus, le fils de ce Dieu allait les sauver. Se sont-ils seulement posés la question de savoir qui avait protégé leurs aïeuls avant l’apparition de Jésus en Afrique ? Se sont-ils seulement penchés avec un peu de sérieux sur les fonctions et qualités d’un Nganga dans la société ? NON.
Malheureusement de nombreux moutons qui suivent leur berger vont cracher péremptoire que les Nganga sont les adeptes du Diable. Normal puisque ces bergers de pasteurs ont pour unique objectif de les éloigner de la réalité en les plongeant dans l’irréalité d’un monde imaginaire avec des personnages créés de toutes pièces, dans le but de les dégraisser par la peur de l’enfer céleste et de s’engraisser dans l’opulence du paradis terrestre.
Nganga et pasteurs: quelques differences
o Les pasteurs demandent aux fidèles de verser la dime/ Le Nganga pas;
o Les pasteurs font la promotion de leurs églises/ les Nganga pas;
o Les pasteurs simplifient parfois le total de la collecte à l’église/ Le Nganga pas;
o Les pasteurs demandent aux personnes qu’ils ont supposé avoir guéris de joindre leur église/ Le Nganga pas;
o Les pasteurs font dans du spectacle (danses, guérisons, délivrances, combats spirituel… sous les yeux des cameras/ Le Nganga pas;
o Les pateurs passent leur temps à maudire et invoquer le feu/ Le Nganga pas…
o COMPLETEZ LA LISTE…..
Pour que l’Afrique et les Africains retrouvent leur rayonnement spirituel, ils doivent obligatoirement se réconcilier avec leur culture et par ricochet avec leurs ancêtres. Cette réconciliation passe inéluctablement par la revalorisation de nos tradipraticiens, et guérisseurs bref de nos Nganga, courroie de transition entre le monde de l’immatériel que nous n’appréhendons pas toujours, et celui matériel dans lequel nous vivons.
par NWAMBE SIAKE
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